Le poids des silences - feat B. Brown

Lyra poussa en douceur la porte de la salle commune des Serdaigles, mine fatiguée après cette première ronde des préfets de l’année avec Billy. A cette heure avancée, seul le crépitement du feu de cheminée se faisait entendre. Douce lumière et bougies projetant des ombres dansantes sur les murs ornés de plumes et de papier, témoignage du caractère studieux de leur maison. La brune s’installa dans un fauteuil moelleux près du feu, poussant un petit soupir de relâchement.

“Enfin une longue journée qui s’achève … Dis-moi Billy, grâce à toutes tes manigances - et celles de tes compères- n’aurais-tu pas un doux breuvage à nous offrir pour nous réconforter de ce juste travail accompli ?”.

Ils avaient marché de nombreuses heures à travers le Château avec l’objectif d’être toujours les plus discrets possibles. Alors forcément, oui, ils avaient parlé de tout et de rien et s'étaient même permis quelques éclats de rire par moment. Cela aura sans doute sauvé un ou deux élèves souhaitant défier l’autorité du corps professoral. Lyra n’était pas une pleine partisane de l’ordre. Ce qui lui plaisait le plus dans son rôle de préfète, était de pouvoir venir en aide aux élèves souffrant de mal-être ou d’harcèlement. Elle comprenait totalement les envies nocturnes de certains d’entre eux car elle ressentait régulièrement les mêmes et se permettait de nombreux écarts à l’extérieur du Château.

Laissant son regard vagabonder dans les flammes si réconfortantes. Son esprit rêveur reprit le dessus et, en repensant à son été, elle se mit à réfléchir à la façon dont Billy avait traversé ces mois. Une chose était certaine, il n’avait pas semblé mettre un point final à l’étrange relation qui l’unissait avec Ophélia. La brune ne pouvait s’empêcher de se demander comment il gérait ce lien si particulier. Certes, Lyra avait toujours été attirée par les mystères, mais cette relation semblait frôler les limites du raisonnable, presque comme si deux meilleurs amis sortaient ensemble, sans ressentir le moindre amour (autre que amical).
Tout en prolongeant ses réflexions, elle réalisa à quel point il était important de comprendre les motivations et les pensées de ceux qui nous entourent. Les liens qu'on tisse peuvent parfois sembler insaisissables, et Lyra se demanda si Billy savait ce qu'il voulait véritablement. Après tout, l'amour et l'amitié sont souvent des chemins sinueux, et elle espérait qu'il serait capable de déchiffrer ce labyrinthe. Un sourcil taquin se hissa sur le visage de la Serdaigle.

“En tout cas, j’ai constaté qu’il y en a un pour qui certaines choses n’ont pas changé… du moins en apparence”.

Elle se redressa dans son fauteuil, regardant son ami, mi-amusée, mi-sérieuse.
“Pour de vrai Billy, j’ai tout fais pour ne pas t’en parler ce soir mais sérieusement. Ophélia et toi ? Je n’ai rien contre elle et tu le sais. Mais… je ne sais pas, quand tu l’as embrassé dans la grande salle, j’ai l’impression de voir un robot. N’as tu pas envie de tester de nouvelles expériences ? ”. Elle s’arrêta aussitôt, ses prunelles brûlantes de malice.

“A moins que… comment t’es-tu occupé cet été ?”.

Le jeune aiglon s’était-il adonné à une nouvelle infidélité ? Au fond, elle espérait qu’un élément déclencheur soit intervenu pour lui ouvrir les yeux -même si elle en était très peu convaincue. Les mystères de Poudlard ne se limitaient décidément pas aux créatures magiques ou aux sortilèges, mais s'étendaient aussi à la complexité des relations humaines. Lyra était déterminée à aider Billy à trouver son chemin, que ce soit à travers les conseils sages d’une amie ou simplement en étant là pour l'écouter. Et bien qu’elle se doutait que cette discussion ne finisse - comme toujours- en queue de poisson. Elle ne pouvait s’empêcher de vouloir lui rappeler qu’elle était là et qu’il pouvait s’appuyer sur elle.

S’étirant tout en gémissant de sa fatigue, Billy suivait sa consœur Lyra avec qui il venait de terminer sa première ronde. Certes, il était content d’être en sa compagnie, néanmoins son esprit ne cessait de vagabonder pour un certain rouge et or qui rendait fou son petit coeur.

Passant la porte de la salle commune des Serdaigles, la pièce principale était vide. Ah, ils étaient sages leurs serdaigles, pas tout le temps, mais là-dessus, les préfets pouvaient compter sur eux.

Lyra s’installa dans l’un des fauteuils moelleux près du feu pendant que Billy sourit. La nuit  promettait de ne pas être terminée pour lui. Le professeur Zabini lui avait donné un devoir supplémentaire qui prenait plus de temps que prévu au mordu de potion. Voilà qui l’embêtait. Et hors de question de demander un délai. Billy voulait finir dans les temps et pouvoir passer à autre chose, comme des projets de maraudeurs.

Lyra lui demanda de quoi hydrater sa gorge. Souriant, Billy lui répondit : « Rassure-toi, j’ai ce qu’il te faut… mais de là à parler de manigances… Madame, pour qui me prenez-vous ? » Finit-il par dire avec un clin d’oeil moqueur. Car oui, il fallait bien que Lyra soit au courant pour couvrir Billy lorsqu’il avait besoin d’un coup de pouce. Certes, le jeune sorcier le lui rendait mais c’était agréable.

Billy prit deux verres qu’il remplit d’eau et s’en alla en direction de sa chambre, lâchant un « Je reviens. »

Une fois de retour, il avait trois fioles en main. Les posant sur la table trônant le fauteuil où était installée Lyra et un autre, Billy fit voler les verres d’eau jusqu’à eux. De là, il jeta un coup à la jeune femme avant de lui faire signe de silence. Billy avait préparé un petit quelque chose pour la prochaine soirée et il était fier de son petit mélange. Préparant son breuvage, il versa un peu de chacune des potions dans un ordre et avec des quantités bien calculées.

Levant les bras, tel un magicien donnant un spectacle et s’apprêtant à montrer quelque chose d’extraordinaire, il ajouta : « Et voici Mademoiselle, un ‘’monsterjacky’’. Un petit cocktail faisant expirer une sympathique petite fumée orangée tel un nuage effrayant. Je me suis dit que se serait sympa pour Halloween. »

Billy donna l’un des verres à sa collègue, puis prit le sien et bu directement une gorgée. Le petit côté orange sanguine vint piquer son palais, lui faisant cligner des yeux, puis le côté doux qui revenait avec cette petite pointe de menthe pour tout rafraîchir faisait expirer agréablement une fumée orange rouge. « Un chouilla trop d’orange sanguine. Déso, ça va piquer un peu. » Certes, le garçon n’avait pas précisé tout ce qui se trouvait dans les diverses fioles, et il comptait bien se garder ce secret.

Lyra reprit la parole à son tour. Sa phrase laissa Billy septique. Certaines choses n’avaient pas changé du moins en apparence… de quoi parlait-elle ? Haussant les épaules, Billy la regarda d’un air de dire : Je ne vois pas de quoi tu parles, mais vas-y explique-moi.

Comme si elle avait lu dans ses pensées (chose impossible, car il n’y pensait pas), Lyra se redressa dans son fauteuil et lança le sujet qui fâche : Ophélia.

« Han ! » fit Billy tout en levant la tête au ciel et haussant les bras. Lyra terminait ce qu’elle avait à dire pendant que Billy s’installait dans le fauteuil à côté d’elle. Ophélia… pourquoi est-ce que tout le monde se focalisait sur eux ?! Elle avait tout fait pour ne pas en parler hein ? Billy haussa les sourcils. Ben voyons, elle n’avait pas fait tant d’effort, vu que finalement elle y venait.

De nouvelles expériences ? Genre. Billy la regarda avec des gros yeux. Elle savait très bien le souci qu’il avait : la fidélité, c’était pas tout à fait ça. Pendant qu’il buvait malgré tout une gorgée de son breuvage, elle lui demanda comme il s’était occupé cet été. Billy manqua de s’étouffer avec le breuvage. « Lyra ! » Il avait clairement compris le sous-entendu.

Déposant son verre sur la table, il ajouta : « Non, je n’ai pas été infidèle cet été. Je tente de corriger cela. Qu’est-ce que tu as contre Féfé et moi, sérieux ? On n’est pas des robots, c’est juste que… c’est compliqué ces temps, c’est tout… c’est notre dernière année ici. »

Puis, semblant réfléchir un instant il ajouta : « Et mon père m’a fiancé… à une fille qui a débarqué cette année à Poudlard et pour qui je n’éprouve absolument rien ! » Se pressa t-il d’ajouter en pointant Lyra du doigt pour qu’elle ne se fasse pas de fausses idées. Passant sa main dans ses cheveux, Billy soupira en ajoutant : « C’est pour ça que c’est complexe… je ne veux pas quitter Féfé, mais y’a ça qui va nous mettre le merdier et… j’essaie de ne plus être infidèle. Ca lui a fait du mal. » ‘Et ça ne m’aide pas du tout….’ pensa t-il.

La véritable raison à l’infidélité de Billy était ses sentiments pour James. Mais vu la situation, seul le désespoir s’emparait de plus en plus du serdaigle qui était complètement perdu.